L’ÉVANGILE DE LA PROSPERITÉ AU SEIN DU PENTECÔTISME CAMEROUNAIS

J’ai lu avec beaucoup d’intérêt, la contribution de mon collègue et frère cadet, le Pr. Nzogue Jean-Baptiste sur la prospérité au sein du milieu pentecôtiste camerounais. J’ai tenu, de la perspective de l’histoire des religions, à la scruter. Ici, deux choses sont à considérer : le pentecôtisme local dans son évolution historique et le rapport à la prospérité comme système doctrinal.
Le pentecôtisme qui naît aux États-Unis en 1901 (réveil d’Azuza Street) est le ministère de deux revivalistes : le Blanc Charles Fox Parham et le Noir William Joseph Seymour. D’abord une simple excroissance des communautés évangéliques américaines, il prend sa propre coloration vers 1950 et devient partie prenante de la troisième vague de l’évangélisation commencée dans la foulée des impérialismes du milieu du XVIIIe siècle.
C’est vers 1959-1960 qu’il atteint le Cameroun. Il est brièvement localisé en pays basaà entre Douala et Édéa ; mais surtout au Cameroun anglophone, parce que globalement, il vient du Nigéria. Dans la mécanique des systèmes religieux, les communautés filles portent toujours deux stigmates : celles du contexte de leur naissance et celle de la parenté culturelle avec leurs communautés-mères.
Le pentecôtisme n’a jamais été, contrairement au protestantisme dans lequel il est né et s’est développé, un courant théologique. Il n’en a pas de propre. Il est plutôt une aspiration à une sorte d’approfondissement personnel ; à un vécu plus spirituel. Ou, si on peut le dire ainsi, la recherche de davantage de sensations ou bien d’émotions. C’est un plus de connexion.
Mais, d’être devenu son milieu clérical propre confère, entre autres obligations, des devoirs cléricaux : bâtir des églises propres, créér ses ministères, former et consacrer ses ouvriers pastoraux, se diffuser au sein du tissu national, adopter ses propres normes doctrinales. Bref, devenir une part du système plus général de l’Église chrétienne nationale. Le pentecôtisme, comme les autres, l’a fait. À sa façon.
L’ennui pour lui a été de le faire en l’absence complète de traditions ecclésiastiques qui ont été la norme des églises antérieures qu’il a trouvées. Il aurait peut-être pu s’en inspirer, puisqu’il a adopté beaucoup de leur langage, de leurs usages et de leurs titulatures. Mais leur coexistence, dès ses débuts, a été entachée d’hostilité. Les pentecôtistes estimaient que ces églises ne marchent pas dans la vérité.
A contrario, les autres, catholiques et protestants, y voyaient des sectes pernicieuses à éviter. Les deux courants ont évolué en quasi confrontation d’autant plus évidente que le pentecôtiste, premièrement, est un chrétien de l’église conventionnelle débauché et retourné. Les pentecôtistes sont pour les autres des pies voleuses qui pondent leurs œufs dans les nids des autres.
La période de 1960 à 1990 est d’implantation pour le pentecôtisme. Pendant ces 30 ans, sous la houlette de pionniers et d’évangélistes, le pentecôtisme fera l’effort de s’installer dans tout le territoire. On peut citer quelques noms : Tobie Mbassi Kuoh, Samuel Obaker, Samuel Dalle, Nestor Toukea, Samuel Mahop, Ebenezer Njoh Sollo et surtout Zacharias Tanee Fomum. (La liste est loin d’être exhaustive).
Il surnage de l’œuvre pionnière de ces aînés, la volonté de construire un ministère semblable à celui des communautés conventionnelles qu’ils ont trouvées, mais reflétant leur particularité. Peut-être ont-ils, à leur façon, réagi à l’hostilité qu’ils en ont endurée. Ou tiré des leçons de leurs propres limitations ou des querelles intestines qu’entre eux, les pentecôtistes se sont livrées.
Peut-être tout simplement, 30 ans plus tard, les pionniers ayant vieilli, faisaient face à un contexte nouveau et à d’autres générations. Le contexte de 1990 est décisif pour les associations en général et les religieuses en particulier. C’est un contexte de contestation ; de défi des règles et normes établies et de profonde démocratisation. Le pentecôtisme revient à l’ère des Juges en Israël : chacun décide de faire ce qui lui semble bon.
La décennie 1990 est marquée par une grande pauvreté : la terrible crise économique, les coupes salariales, les licenciements et les déflations, les ruines de commerces et d’entreprises, le tumulte social, la fermeture d’écoles, l’arrêt de recrutements. On assiste à une ruée vers le pentecôtisme qui propose ses solutions. Celles-ci sont exactement à son image : simplistes, directives, pratiques, expéditives et, malheureusement, surréalistes.
C’est dans un tel contexte que l’évangile de la prospérité sera considéré. Cette doctrine existe depuis. Elle vient des États-Unis d’Amérique. En terme de religion, ce pays est un laboratoire à ciel ouvert de toutes sortes d’extrapolations. Mais c’est aussi et surtout un pays doté d’un rapport particulier à la richesse, à l’avoir et à l’argent ; de l’entrepreneuriat facile, illimité et osé.
Des prédicateurs y avaient théorisé des enseignements sur les capacités d’enrichissement ; les normes d’évaluation de prospérité pastorales fondées sur des grandeurs : d’audience, de bâtisses, de comptes bancaires, d’apparence. Cela requérait de l’ingéniosité. Cela se révéla séduisant pour une Afrique désemparée. Une vague littérale d’entrepreneurs pentecôtistes se suscita : vêtus comme des artistes de show, pratiquant du marketing chrétien.
L’idée aurait peut-être été géniale et utile, n’eût été la tare existentielle du pentecôtisme : la faiblesse de la formation. Aux États-Unis où la doctrine de la prospérité est née, la société est bien structurée et profondément intégrée. Le pays possède une solide législation. Les masses sont bien encadrées. C’est ça ici au pays – et en Afrique plus généralement – qui manque au pentecôtisme.
On a donc transposé, sur le mauvais terreau, une plante pernicieuse qui a prospéré parce que des charlatans voulaient en profiter. Sont alors venus la simonie ; le commerce de grâces ; l’esprit de python grimé sous l’habit de la prophétie ; la fausse doctrine ; l’imposture. Ces tares se révélaient d’autant plus facile à démasquer qu’elles ne résistent pas à un examen, même sommaire, des Écritures.
Malheureusement, étant ce qu’il est et comme il est, le pentecôtisme n’a pas moyen de s’en amender et de le corriger. C’est une lèpre dont il est flétri qui reflète les chemins qu’il a pris et qui montre la destination à laquelle il va arriver. Mammon est un dieu trop séduisant pour ne pas être révéré. On ne peut rien faire sans argent. Et les faux pasteurs de s’exclamer : Dieu m’a béni. Pour preuve : ma prospérité !
Des perspectives ? Oui. Il y en a. Mais est-ce à moi d’en parler ? Ce courant a quitté son humilité d’antan. Hier, il n’était que simplement ignorant. Aujourd’hui, il est ignorant et arrogant. Pas seulement : ignorant, arrogant et méchant. Sur ces défauts structurels, il ajoute les vices qu’il reprochait aux églises conventionnelles : la cupidité, la félonie, le mensonge et l’impudicité.
Ce sont généralement des vices que cultivent des gens riches ou qui recherchent la richesse.
Et c’est ce qu’est la prospérité : la recherche effrénée de richesse…

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